Le sable chaud
Nous avions pris nos congés tardivement dans l’été 2018 et traversé la France en diagonale pour aller découvrir une plage de sable fin sur la presqu’ile de Quiberon. Nous étions là pour une semaine et bien décidés à se reposer un maximum. Nous avions repéré rapidement une plage qui nous convenait à merveille tant par la vue qu’elle offrait que par son aspect reculée et peu fréquentée en cette période hors saison.
Cette espace étendu de sable fin disposait d’un environnement bâti assez singulier et bien typé de la région. Face à ce paysage et cette proximité de maisons individuelles qui bordaient cette frange du littoral, le carnet de croquis ne me quittait plus. Dès les premières heures, à quelques mètres de nous, avait pris place discrètement, sur le sable déjà chaud, une dame solitaire d’un certain âge.
Sa posture, son image, son élégance un peu surannée interpellaient ma curiosité. Le second jour, elle fut au rendez vous également, mais si concentré sur mon croquis de maisons environnantes, je ne l’avais pas vu prendre place. Sa posture, son image, son élégance un peu surannée restaient identique à la veille. On aurait pu croire qu’elle ne s’était pas absentée tant elle renvoyait une image conforme au jour précédent. Il m’était impossible de laisser passer la journée suivante sans voir son arrivée et l’appropriation de son espace habituel.
Le rituel et l’image de cette dame m’intriguait, J’IMAGINAIS TOUTE UNE HISTOIRE, comme pour mieux essayer d’appréhender son univers au travers de ses attitudes et de ses gestes. Le lendemain, à l’affût depuis quelque temps, la silhouette de cette dame m’interpella de loin. Le carnet de croquis attendait ma première ébauche mais avant tout il m’était nécessaire de pouvoir capter une partie de sa personnalité au travers de sa démarche et de son rituel de mise en place.
Elle s’approchait d’un pas agile et rythmé, encombré de sa chaise pliante et d’un énorme panier d’osier. Elle franchit la fine margelle en pierres appareillées qui délimitait l’espace plage de la partie urbaine et minérale. Elle avança environ d’une dizaine de mètre sur le sable en direction de la mer et stoppa à l’endroit habituel avec cette précision presque technologique d’un GPS réglé par coordonnées. Elle mit en place sa chaise pliante avec une toile bleue parfaitement tendue sur la structure aluminium, le panier d’osier qui contenait quelques accessoires tel que le tapis de sol au ton rouge orangé, la crème solaire et les magazines allait rapidement prendre place sous l’assise de la chaise pour ne former avec les chaussures de type mocassin q’un ensemble bien compacte capable de limiter au maximum son emprise au sol.
Un sac besace en tissus à grosses rayures qui avait contribué à transporter un coussin et la serviette de bain en éponge allait se loger sous le devant de la chaise. elle retira sa robe mi-longue qu’elle mit dans le sac à rayures et ajusta son haut en rayures fines bleues. Elle prit place sur sa chaise avec une agilité qui détrompa sa corpulence. Une fois assise, elle ajusta sa paire de lunette sombre et enveloppante qui lui conférait une allure de star hollywodienne.
L’harmonisation des textures rayées, la présence de quelques bijoux discrets, le rouge à lèvre en liaison avec le verni à ongles et le tapis de sol, apportaient une élégance dissimulée et toute particulière à ce tableau. Elle alternait entre observer les estivants à sa portée et parcourir les magazines qu’elle avait soigneusement mis à disposition sous sa chaise. De retour de mes congés, le tableau prit forme grâce au croquis réalisé sur place et je vous invite à partager ce moment en le découvrant ici.