DÉCROCHAGES - 100 x 100

Après avoir pensé tout d’abord mettre la maison en vente, les enfants s’étaient réunis pour évoquer les vacances inoubliables qu’ils y avaient passées avec leurs grands-parents et ils avaient finalement renoncé à leur décision initiale : ils garderaient cette vieille demeure et la réaménageraient de fond en comble. Il fallait donc démolir, et la salle d’eau fut le premier espace touché en vue de cette transformation. Les décrochages commencèrent…La peinture explore les différentes zones colorées d’une destruction rénovée et laisse apparaître les cônes d’une lumière naturelle qui pénètre cet espace en transition

Dans l’intimité d’une salle de bains, l’artiste partage un regard sur le temps qui passe, le rapport à la vie et son pendant mortifère. L’œuvre est profondément allégorique. Alain Rouschmeyer réactualise le thème classique des vanités et du memento mori (souviens-toi que tu vas mourir).  Le tour de force de l’artiste est de parvenir à traduire la présence humaine bien qu’elle en soit directement absente. Le miroir est décroché, il ne manque pas pour autant dans la composition. La toile projette en quelque sorte son propre reflet sur le regardant et invite à l’introspection. Le peintre évoque un état transitoire, une métamorphose qui va donner lieu à un renouveau, une renaissance. Les décrochages sont ceux des stigmates du temps, des aménagements menés au fil du vieillissement du corps jusqu’aux derniers battements du cœur. Le lieu va perdurer, le souvenir des absents aussi. Il va prendre un nouveau visage, un nouveau corps soumis à l’impermanence. Un masque reste accroché comme une marque prégnante de notre époque. Il sera lui-même oublié dans la marche de l’Histoire. Le peintre nous offre une toile métaphysique d’une grande force évocatrice.

Andréas ALBERTI - Auteur, critique d'art, journaliste spécialisé - juillet 2022